Si en rénovation, l’isolation par l’intérieur prévaut dans nos habitudes françaises, elle peut parfois générer des problèmes de condensation... et donc de moisissures, qui se révèlent toxiques pour les habitants. Comment les éviter et comment y remédier ? il existe des solutions fiables et durables : celles qui prennent en compte les échanges hygrométriques du bâtiment.
L’isolation thermique placée côté intérieur d’une paroi a pour buts de diminuer les déper- ditions calorifiques et d'améliorer la valeur U (coefficient de transmission thermique en [W/(m².K)]), mais elle doit également respecter les valeurs garde-fous de la réglementation thermique pour l’existant. C’est une solution qui s’impose lorsque l’on ne peut modifier la façade d’un bâtiment : rénovation thermique de copropriétés, de monuments historiques ou encore de maisons à colombages avec structure bois apparente. Elle est également reconnue pour favoriser un réchauffement rapide de l’espace intérieur et permet de conduire une rénovation pièce par pièce.
Une forte isolation intérieure améliore la valeur U de la paroi, (visible dans les calculs théoriques de déperditions de chaleur), mais malgré tout, elle n’améliore pas aussi significativement les besoins de chauffage.
Elle est toutefois moins bien perçue en ce qui concerne les transferts d’humidité et les risques éventuels de condensation. De fait, on recommande des épaisseurs d’isolant relativement faibles pour minimiser la perte de surface habitable, mais également, en physique du bâtiment, pour atténuer les effets des ponts thermiques qui peuvent s’en trouver renforcés.
L'isolation par l'extérieur est en général la meilleure solution pour traiter thermiquement une paroi. La maçonnerie est mise «au chaud», le mur agit dans la plupart des cas comme un frein à la diffusion et les problèmes de condensation dans la couche d'isolation extérieure restent rares. De plus, le transport d’humidité liquide par capillarité est évité grâce à la nouvelle protection extérieure (plus de pluie battante).
Avec une isolation thermique intérieure, la maçonnerie existante est plus froide et plus humide en hiver. La température baisse et la teneur en eau s’élève à la jonction de l’isolant et du mur. Pour cette raison, il faut vérifier au cas par cas l’emplacement du point de rosée (point de condensation) en utilisant des logiciels spécialisés.
Pour obtenir les aides financières (notamment le prêt à taux zéro) il est nécessaire d'ajouter une résistance thermique supplémentaire de 3,7 m².K/W, ce qui revient à ajouter une épaisseur d'isolation d'environ 14,8 cm avec une conductivité thermique de 0,04 W/(m.K).
Or, non seulement, cette épaisseur réduit fortement les mètres carrés habitables, mais en plus, elle apporte une résistance thermique conséquente à la paroi, ce qui setraduit par un déplacement important du point de rosée vers l'intérieur de la paroi. Cette prise de risque est-elle justifiée par ces fameuses aides ?
Plusieurs études ont déjà montré que la relation entre les besoins de chauffage et l'amélioration de la valeur U du mur n'est pas linéaire. Au-delà d'une certaine épaisseur (10 cm), l'ajout d'isolant apporte une faible amélioration sur les besoins de chauffage...
L'étanchéité à l'air est un point crucial dans les constructions neuves, mais également dans les rénovations, notamment pour le label BBC-rénovation. Il existe différents produits permettant d’obtenir une construction étanche à l'air. Cela peut être un enduit intérieur, une membrane, des panneaux (plaques de plâtre à parement cartonné, OSB)... Néanmoins les caractéristiques de ces différents produits sont très variables et il est nécessaire lors de la conception et la réalisation de choisir quel système sera utilisé à quel endroit de la construction et surtout dans quel but.
Le terme « étanchéité à l'air » est dans la plupart des pays européens (Allemagne, Suisse, Belgique, Autriche) défini comme une couche installée côté intérieur de l'isolant (côté chaud) qui apporte une résistance à la diffusion de vapeur d'eau (frein-vapeur et pare-vapeur). Ce n'est souvent pas le cas en France, où il existe des produits vendus par les fabricants comme produits d'étanchéité à l'air qui sont très ouverts à la diffusion de vapeur d'eau. Ces produits se posent directement contre le mur existant, donc côté froid de la couche d'isolation, ce qui augmente le risque de condensation entre le mur et l’isolant.
Si l'isolation est réalisée à l'aide de panneaux composites rigides, selon les prescriptions du DTU 25.42, et que l'étanchéité est assurée par un enduit ou une membrane posé sur le mur, il y a toujours un risque de circulation d'air qui, parvenu au dos de l’isolant, peut se refroidir progressivement et atteindre le point de rosée.
Pour éviter ce problème, la meilleure solution est de placer la membrane frein-vapeur/pare-vapeur côté chaud de l'isolant et de le protéger ainsi de l’air chaud et humide provenant de la pièce occupée.
Fig 8 : Risque de circulation d’air en cas de pose d’un isolant composite rigide sur un mur irrégulier enduit.
Fig 9 : Isothermes de températures sur un mur isolé par l’intérieur en rénovation.
Le point faible dans une telle configuration de mur (isolation intérieure rapportée) réside aussi dans le pont thermique situé au niveau du plafond intermédiaire, zone difficile à isoler en rénovation. Il se traduit par des températures plus froides au niveau des solives que sur le mur isolé. La figure 8 montre ce qui se passe avec une température intérieure de 20 °C et une humidité relative de 50 %, le point de rosée est atteint à une température de 9,3 °C. C'est pourquoi l'isotherme* de 10 °C est également connu sous le nom « isotherme de condensation » et c'est bien cette température, ou plutôt son emplacement dans la construction, qui est à analyser pour chaque projet de rénovation en cas d’isolation par l’intérieur. Si les températures superficielles diminuent comme le montre la figure 9, le risque d'une formation de moisissure et de condensation augmente, tout d'abord dans les angles autour des solives ou aux coins d'un mur de refend.
Sur cette maison en pierre isolée par l’intérieur, impossible de voir les défauts liés à l’humidité à première vue et pourtant…
Les occupants d’une maison rénovée ont commencé à souffrir de maux variés, liés à une exposition permanente à des substances nocives. La recherche des causes a mené à la découverte d’un dégât constructif : des moisissures s’étaient formées derrière un isolant intérieur, à la jonction d’un mur en pierre et d’une cloison à structure bois. Les moisissures ne s’étaient pas seulement formées à l’endroit le plus froid du mur (mur de refend, coin extérieur, environ 2 m au-dessus d’une prise électrique), mais également près d'un radiateur, un endroit relativement chaud mais humide : il y avait des soucis d'étanchéité à l'eau au niveau du raccord entre le dormant d’une fenêtre et le gros œuvre et des problèmes de remontées par capillarité du côté extérieur du mur.
Les moisissures apparues sur les murs maçonnés, responsables des problèmes de santé des occupants...
L’isolation de 7 cm en polystyrène rigide n’est pas adaptée sur un mur en pierre.
Les erreurs commises dans ce projet ont été multiples : mauvaise étanchéité à l'air, mauvais raccordement aux composants adjacents, mais également, protection insuffisante contre la pluie et les remontées capillaires et mauvais choix d’isolant : les panneaux en mousse expansée n’ont pas la capacité suffisante pour absorber les quantités d'humidité arrivant par capillarité vers le côté intérieur. La surcharge d’humidité sur la surface intérieure de mur et l’impossibilité pour cette eau de sécher, se sont traduites par une accumulation d’eau dans les joints épais du mur et dans les pierres. Ce climat a favorisé l’apparition de moisissures à différentes températures (différents types de champignons se sont développés selon les supports qui leur étaient favorables).
L’isolation intérieure a été alors refaite, en enlevant le revêtement intérieur, les panneaux d’agglomérés enduits, le pare-vapeur et l’ancienne isolation. Avant de poser une nouvelle couche d'enduit sur le mur, les moisissures ont été éliminées. Un enduit chaux-ciment est alors appliqué : il permet de couper les capillarités côté extérieur, mais également de stocker une faible quantité d'humidité en cas de diffusion. Une ossature bois est ensuite fixée sur le mur enduit pour porter une membrane frein-vapeur hygrovariable et créer un espace d'insufflation pour de la ouate de cellulose. Ensuite, un contre-lattage a été posé avant finition intérieure en plaques de plâtre.
L’isolation végétale, posée ici par insufflation, apporte plusieurs avantages : une mise en œuvre sans vide d'air (ce qui supprime le risque de condensation côté froid) et des propriétés hygroscopiques et absorbantes intéressantes. La ouate de cellulose supporte très bien les pics d’humidité qui surviennent à l’interface froide avec le bâti existant. Les membranes hygrovariables, comme par exemple pro clima INTELLO PLUS, conviennent particulièrement bien aux constructions exigeantes en termes de physique du bâtiment. Une telle membrane garantit un séchage durable des éléments de construction. Elle peut évacuer rapidement la charge d’humidité vers l’intérieur en été et veiller à ce que l’isolation reste sèche en hiver, grâce à une protection accrue avec une plage importante de la valeur Sd de 0,25 à plus de 25 m. (Valeur Sd : résistance à la diffusion de vapeur d’eau. Elle désigne l'épaisseur de la couche d’air équivalente à la diffusion en mètres).
À des fins de recherches, la maison a été équipée de capteurs pour mesurer les taux d’humidité et les températures. Les données récoltées ont montré la pertinence des choix de cette rénovation. C’est aussi l’impression des occupants qui se sentent très bien dans les pièces rénovées.
Relevé des taux d’humidité après les travaux : la maison est à nouveau saine.
Le développement de champignons et de moisissures sur les surfaces intérieures d'une paroi ne peut se faire que si toutes les conditions de croissance sont réunies : température entre 0 °C à 50 °C avec un optimum de 20 °C à 35 °C et humidité relative de 70 % à 98 % (en fonction du type champignon), supports favorables comme des composants organiques avec une valeur pH comprise entre 1,5 et 11. L'ambiance intérieure (humidité relative et température), les sources d'humidité par l'occupation et/ ou éventuelles (pluie battante, remontée capillaire), une mauvaise ventilation, un chauffage trop faible, une isolation trop importante au niveau des ponts thermiques... peuvent rassembler les conditions de croissance d'un ou de plusieurs des 60000 champignons répertoriés.
Les conséquences pour les habitants sont variables (réactions allergiques, problèmes infectieux...) mais des recherches épidémiologiques prouvent la nocivité des champignons sur la santé des occupants. C’est pourquoi, il est important de limiter les risques de condensation dans les bâtiments rénovés : une isolation maîtrisée avec des isolants végétaux prend alors tout son sens.