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L'esthétique du CLT

Réalisation Karawitz

Cette construction, située dans le Pas-de-Calais et livrée à l’été 2014, a été entièrement réalisée en CLT. Mieux : elle a été pensée pour être réalisée en CLT. Au cahier des charges : du bois, du passif et une esthétique moderne... 

Texte: Claire Leloy – Photos : Mischa Witzmann (Karawitz) 

Les maîtres d’ouvrage savaient exactement où ils voulaient aller : une maison résolument contemporaine et notablement performante avec une certification Maison Passive à la clé. Partant de cet objectif d’efficacité énergétique, leur premier réflexe fut de chercher conseil auprès d’un bureau d’étude thermique, largement reconnu en matière de passif : Energelio. Mais, au vu de la surface habitable nécessaire et des ambitions en matière esthétique, il fallait trouver un architecte. « Sans doute la décision la plus difficile à prendre » du propre aveu des maîtres d’ouvrage. Leur choix s’est nalement arrêté sur l’agence parisienne Karawitz, spécialisée en construction bois et conception passive.

Ossature ou bois massif ?

Au stade de l’esquisse, l’agence Karawitz propose différentes options de formes et d’identités pour la future maison. C’est la toute première proposition qui fait mouche : un esprit extrêmement moderne, reposant sur deux volumes superposés, et une légèreté octroyée à l’ensemble par deux porte-à-faux. « Bien évidemment... c’était la solution la moins compacte et la plus délicate pour construire du passif » note Milena Karanesheva en souriant. Cette option est donc chiffrée avec différentes solutions constructives. En clair : version ossature bois et version CLT. Il est important de souligner que le budget n’était pas tout à fait extensible et qu’il s’agissait d’une contrainte essentielle. Le projet cumulant des problématiques de haute performance énergétique et des contraintes mécaniques de taille (avec les porte-à-faux), l’exercice risquait d’être coûteux...

Décrochements et performance

Contre toute attente, c’est la solution avec panneaux CLT qui a tiré son épingle du jeu (avec 80 000 euros de moins que la solution ossature bois), notamment parce que le matériau, autoportant, est bien mieux adapté (et donc moins coûteux) à la réalisation de porte-à- faux. Un autre poste permet de substantielles économies : le CLT autorise de se passer de doublage et de peinture pour qui est en phase avec l’esthétique bois. Ce qui était le cas des maîtres d’ouvrage, qui ont ainsi économisé 30 000 euros sur les postes de finition. Enfin, le CLT était particulièrement cohérent dans ce projet passif : permettant d’alléger les épaisseurs d’isolant, il garantissait aussi une excellente base pour la qualité de l’enveloppe et de son étanchéité. Dernier avantage : il offrait une inertie tout à fait intéressante pour le confort sans qu’il ne soit nécessaire d’ajouter d’autres matériaux.

Secrets de fabrication

C’est donc bien entendu la solution CLT qui est retenue. Toutes les parois opaques (murs, planchers, toiture) seront réalisées avec le matériau. Après la phase de dimensionnement et sur la base des calculs des ingénieurs structure (Ingénierie Bois, 67), les panneaux (KLH) sont réalisés sur mesure en Autriche. Des panneaux trois plis en épicéa sortent de l’usine : 95 mm d’épaisseur (pour les murs), 108 mm (pour le plancher intermédiaire) et 140 mm (en toiture et pour un mur de refend) sont livrés début avril 2014. Au sol, pas de cave : une dalle béton de 200 mm d’épaisseur a été posée sur du schiste. Ce plancher bas devait initialement être isolé avec du liège. C’est finalement du polyuréthane qui jouera ce rôle (200 mm) pour une résistance thermique de 8,3 m².K/W. Par dessus, une chape puis du linoleum seront posés ultérieurement. Pour l’heure, la structure arrive. Le chantier ne réclame aucun délai de séchage et, reposant sur des éléments entièrement préfabriqués, il sera très rapide. Quelques jours suffisent pour que la maison apparaisse et soit hors d’eau.

Continuité de l’enveloppe

Triple vitrage

Le terrain, sa situation et son environnement permettaient une orientation optimale de la maison dans le but de maximiser les apports solaires passifs. De ce fait, la façade sud est particulièrement ouverte, avec 33 m² de fenêtres (soit 27 m² de vitrages), promesse d’importants apports solaires. Les autres façades ont reçu en tout 18 m² de vitrages et toutes les ouvertures ont été équipées de triple vitrage ; la conductivité thermique et le facteur solaire varient selon les expositions. Les ouvertures ont été percées dans les panneaux en usine avec une grande précision, les menuiseries sont alors posées avec le plus grand soin (et avec l’ajout de compri-bande) afin de maintenir la continuité des parois en CLT. De la même manière, les jonctions entre panneaux ont été gérées selon les prescriptions du fabricant par collage de bandes spécifiques afin de préserver l’étanchéité. Le résultat est à la hauteur des attentes puisque les tests d’infiltrométrie ont révélé une enveloppe de grande qualité, compatible avec les exigences du passif, avec une étanchéité située entre 0,25 et 0,30 vol/h sous 50 pascals (le test, réalisé par une journée venteuse ne pouvait être plus précis et sera de nouveau réalisé).

CLT + isolation par l'extérieur

Côté isolation, les murs ont reçu 240 mm de fibre de bois par l’extérieur (posés dans une ossature rapportée) et présentent une résistance thermique de 6,6 m².K/W. La toiture, promise à une prochaine végétalisation, est plate. Le CLT mis en œuvre pour sa structure présente une épaisseur de 140 mm, il est isolé par l’extérieur avec 360 mm de fibre de bois avant membrane d’étanchéité, pour un R de 11 m².K/W. Du côté des porte-à- faux, pas de problème de structure : le CLT est quasiment fait pour... la problématique se situe davantage du côté thermique, puisque ces décrochements peuvent générer des faiblesses. Un grand soin a donc été apporté sur ces deux points particuliers. Le plancher de ces porte-à-faux (panneau de 140 mm) sont isolés par l'extérieur avec une épaisseur de 240 mm de fibre de bois et un soin particulier est porté sur la jonction entre ce décrochement et la paroi verticale. Côté intérieur, les porte-à-faux ont reçu un complément d’isolation avec 40 mm de fibre de bois avant chape.

Quels besoins, quelles solutions ?

Des pertes et des gains

Le bureau d’étude Energelio estime à 4810 kWh les apports solaires annuels (dont 3782 kWh/an via les ouvertures sud). Rapportés à la surface de référence, le PHPP estime ces apports solaires à 23,8 kWh/m².an. Il faut leur ajouter les apports internes (liés à la présence des occupants et à leurs activités : cuisine, salle de bain, électroménager...) à hauteur de 10,3 kWh/m². an. Le total des apports gratuits (après pondération) se monte donc à 31,6 kWh/m².an. Côté déperditions, leur somme (déperdition par conduction et déperditions aérauliques) est estimée à 45,2 kWh/m².an. Les besoins en chaleur sont le résultat de la confrontation de ces deux chiffres : déperditions – apports... On obtient un besoin en chauffage de 14 kWh/m².an. De faibles besoins qui satisfont pleinement aux exigences de la Maison Passive.

Ventilation double-flux

Un système de ventilation double flux (Paul Ventilation Novus 300) a été installé afin de renouveler l’air sans pour autant perdre les précieuses calories. Si il a été envisagé d’installer une chaudière gaz à condensation, le projet a été abandonné au profit d’une pompe à chaleur. L’investissement, de même que l’abonnement au gaz, n’étaient pas cohérents au vu des modestes besoins. La PAC (air/eau) puise ses calories dans l’air et les distribue à travers un réseau d’eau, relié à des émetteurs. En l’occurrence, la chaleur est diffusée par deux murs chauffants situés dans le salon (pour une surface de diffusion, basse température, de 10 m²). Cette PAC est également asservie à la production d’eau chaude sanitaire.

Lumière naturelle

Côté lumière, la forte exposition sud permet de bénéficier d’un important éclairage naturel, limitant d’autant le recours à la lumière artificielle. En outre, deux puits de lumière (Solatube) ont été installés pour apporter cette lumière naturelle vers des endroits qui en étaient dépourvus : l’entrée et la salle de bain. Les panneaux de CLT ont été percés en conséquence en usine pour l’installation des tubes, de sorte à éviter tout percement sur place.

La maison, aujourd’hui en cours de certification «Maison Passive» a été livrée le 31 juillet 2014. Habillée de bois et de noir (panneaux Trespa), elle affirme une identité forte. Clairement cubique et pourtant aérienne, évidemment moderne mais savamment discrète, la maison est avant tout une réussite : passive sans concession à l’esthétique, en bois sans dépasser le budget initial. 

 

La maison en bref

Type : maison individuelle
Lieu : pas-de-calais (62)
Surface habitable (sRE) : 205 m²
Livraison : 2014
​Architecte : Karawitz, Paris
Bureau d’études fluides et thermique : Energelio, seclin, 59
Bureau d’études structure bois : ingénierie bois, bischheim, 67
Constructeur : Edwood, saint André lez Lille, 59
Procédé constructif : structure CLT
Isolation : Fibre de bois
Chauffage et ECS : PAC air/eau
Coût du lot bois : 89.665 € HT, soit 437 €/m² shab 

 

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